Jacinthe Robillard nous présente l’étendue de ses connaissances aux Territoires

Je l’avoue, j’ai récemment pris beaucoup de retard dans mes visites d’expositions au Belgo. Ce jeudi, j’avais décidé de rattraper partiellement le temps perdu, mais finalement, je dois dire que j’ai eu beaucoup de difficulté à quitter la galerie Les Territoires pour voir le reste. C’est que l’exposition L’étendue de mes connaissances de l’artiste Jacinthe Robillard hypnotise par sa simplicité et son attention portée aux détails, et qu’au mois de décembre, en fin de session d’université, ça fait du bien de se retrouver dans une atmosphère quasi zen. Je suis donc totalement subjective dans mon appréciation de l’exposition, mais vous pourrez en juger par vous-mêmes en allant y faire votre tour.

Dans la première pièce de la galerie, Robillard a installé une série de portraits de ses connaissances. Jusque-là, rien de bien déstabilisant, mais les photographies sont tout de même superbes et sobres et s’intègrent bien au le reste de la proposition. Les portraits sont tous cadrés de la même façon : de front, le modèle se tenant derrière une table blanche et tournant le dos à un fond gris. Bref, toute la place est laissée à la posture du sujet, à son regard, à son expression. Plus loin, les instructions visuelles pour effectuer une figure d’origami, la grue, sont reproduites, et l’on observe avec attention cette série de petits symboles plus ou moins déchiffrables, mystérieux, précis. Pourquoi ces instructions? En fait, Robillard a demandé à ses connaissances de reproduire la figure en question afin d’observer leurs manies, leur capacité à analyser la marche à suivre, leur niveau de patience et de concentration, et cetera. L’origami n’est en fait qu’un prétexte servant à révéler leur vraie nature, si l’on veut.

L’exercice se matérialise sous forme de vidéos projetées sur un mur de la seconde pièce et présentées dans une petite télévision placée dans un coin de la même salle. Alors que le premier dispositif projette des images découpées et montées, l’autre laisse l’ensemble défiler en temps réel dans des séquences pouvant durer jusqu’à une douzaine de minutes (et personnellement, j’ai beaucoup apprécié la version longue, plus authentique à mon avis). Le spectateur est alors invité à observer ces participants très concentrés, perplexes, fronçant les sourcils, soupirant, se décourageant, abandonnant, recommençant, riant de leur piètre performance, fiers de leur réussite. Quelques-uns parlent, d’autres restent très silencieux. Bref, c’est fascinant de voir comment chacun aborde le défi proposé. Il y a aussi un décalage intéressant entre la découverte des connaissances de Robillard par le biais de la photographie et ensuite par la vidéo, alors qu’une gestuelle complexe s’ajoute à leur pose figée du début. De plus, le simple fait d’être attentif au papier se pliant et se repliant propose aussi une expérience particulière, très zen, comme je l’ai écrit plus haut, et l’inutilité de la chose la rend encore plus belle. Il y a aussi un questionnement amorcé sur l’idée des symboles utilisés pour expliquer certaines marches à suivre qui ponctuent notre quotidien, qui sont souvent plutôt confus, pas toujours très évidents à comprendre, et qui doivent souvent s’accompagner de mots pour qu’ils soient réellement efficaces.

Bref, peu importe le temps que vous passerez aux Territoires quand vous irez voir cette exposition, vous y passerez assurément un bon moment. Il y a aussi une petite chance que l’envie vous prenne de faire des Mr Dressup ou des Claude Lafortune de vous-mêmes en vous mettant au pliage de papier, mais ça, c’est moins certain. Dans un cas comme dans l’autre, ça en vaudra la pleine, alors allez-y.

Les Territoires, espace 527
Jacinthe Robillard
L’étendue de mes connaissances
1 au 22 décembre 2012
http://www.lesterritoires.org


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